Bienheureux Louis-Zéphirin Moreau

Le Saint Mgr Moreau

Mgr Louis-Zéphirin Moreau

1824-1901

Louis-Zéphirin Moreau naît à Bécancour, au Québec, en 1824. Il est le cinquième enfant d’une famille qui en comptera treize. Peu apte aux travaux de la ferme en raison d’une santé fragile, il cache cependant une intelligence vive et réfléchie derrière un physique ingrat. Pieux, doux, modeste et tenace, il étudie au séminaire de Nicolet et se destine au sacerdoce. Il poursuit des études en théologie tout en enseignant aux élèves plus jeunes du cours classique. Bientôt sa santé l’oblige à prendre du repos. Quand il demande à l’évêque de Québec, Mgr Signay, de l’admettre au sacerdoce, celui-ci refuse estimant qu’il a assez de pots fêlés dans son diocèse.

Abattu mais tenace, le jeune homme de 22 ans se tourne alors vers l’évêque de Montréal, Mgr Bourget, qui l’accueille. Il franchit, en quelques mois, toutes les étapes menant à la prêtrise. Mgr Bourget devient son maître spirituel. Sous son influence il développe des dévotions à l’Eucharistie, à Marie, au Sacré-Cœur, aux Anges gardiens et à l’Église. Il est ordonné prêtre le 19 décembre 1846. Ses premières fonctions sont : cérémoniaire à la cathédrale de Montréal et secrétaire adjoint à l’évêché. Très vite, il devient responsable de la chancellerie et aumônier de l’Asile de la Providence.

Pendant six ans l’abbé Moreau s’initie alors à l’administration diocésaine et à la pastorale pour laquelle il a peu d’attrait. Cependant, les pauvres découvrent en lui un être d’une bonté exceptionnelle si bien que l’on commence à l’appeler Le bon Monsieur Moreau.

À la création du diocèse de Saint-Hyacinthe en 1852, l’abbé Moreau est nommé, à 28 ans, secrétaire-chancelier du premier évêque, Mgr Jean-Charles Prince. Tour à tour, il cumule les tâches de curé de la cathédrale, procureur diocésain, aumônier de religieuses. Il occupe ces fonctions et bien d’autres pendant près de 24 ans auprès des trois premiers évêques de ce diocèse. Il succède à Mgr Charles LaRocque en 1876. Sa devise est : Je puis tout en celui qui me fortifie.

Au cours de son épiscopat, Mgr Moreau crée de nouvelles paroisses, construit la cathédrale actuelle et fonde le chapitre diocésain. Son souci pour les prêtres et les pauvres l’incite à inviter des communautés religieuses et en fonder deux : les Sœurs Sainte-Marthe-de-Saint-Hyacinthe, pour le service des prêtres du Séminaire et les Sœurs Saint-Joseph-de-Saint-Hyacinthe pour l’éducation des jeunes en milieu rural. De plus, inspiré des œuvres des catholiques sociaux français, il fonde en 1874 l’Union Saint-Joseph afin de venir en aide aux travailleurs et pallier les accidents et le chômage. C’est ainsi que sa réputation se poursuit et le devance. Consacrant chaque semaine toute une journée à l’accueil et à l’écoute des pauvres dont il aura toujours soucis, il devient pour tous, le bon Mgr Moreau.

Travailleur infatigable, il entretient une importante correspondance. Proche de ses prêtres, cordial et franc, soucieux de leur formation permanente, il organise à leur intention retraites et conférences. Il accorde une place importante dans son ministère aux visites pastorales. Il s’intéresse également au débat sur le libéralisme, aux problèmes reliés à la fondation de l’Université de Montréal et à l’affaire des écoles au Manitoba. Mgr Moreau décède le 24 mai 1901. Le pape Jean-Paul II le béatifie le 10 mai 1987. Il est ainsi le premier évêque d’origine canadienne française à recevoir cette reconnaissance.

Sa spiritualité

            Mgr Moreau sait rejoindre le cœur des gens en leur annonçant la Parole de Dieu dans un langage simple que chacun peut comprendre. Il est reconnu pour ses qualités intérieures de bonté, d’humilité et de fermeté et par le service désintéressé des personnes. La prière est à la source de son action pastorale. Il écrit aux prêtres : « Nous ne ferons bien les grandes choses dont nous sommes chargés, que par une union intime avec Notre-Seigneur, et en nous imprégnant de son esprit et de son zèle, ce que nous ne pouvons obtenir que par la prière et la constance dans la prière. »

            Attentif aux besoins de son époque, il vit modestement, sans austérité excessive. Sa préférence va aux plus pauvres, aux illettrés, aux malades, qu’il accueille chaque lundi, pour les écouter et les encourager. Il n’hésite pas à puiser dans ses biens personnels pour les aider. Le secret de sa disponibilité réside dans sa soumission à Dieu. « La volonté divine avant tout : c’est notre quotidien, et c’est une nourriture qui met l’âme et le cœur dans un repos et un calme parfaits. »

            C’est avec répugnance qu’il accepte la charge d’évêque dont il connait trop bien les servitudes. Il écrit au pape : « Si je ne consultais que mes propres forces, et si je considérais que mon peu de vertus, de mérites, de sciences et de connaissances, j’n’hésiterais pas un instant à supplier à deux genoux Votre Sainteté, d’éloigner de moi ce calice amer, car je ne puis envisager autrement la dignité et la charge épiscopale dont une expérience de vingt-neuf années passées à côté et dans l’intimité des évêques, m’a fait pour ainsi dire toucher du doigt les peines et les croix. »

            Ses relations avec les prêtres sont faites de droiture : « … nous nous disons la vérité et la pure vérité. Comme cela nous saurons constamment à quoi nous en tenir et il n’y aura jamais d’ambiguïté. » L’étude est un devoir qui s’impose aux prêtres « pour donner un enseignement sûr et solide, et diriger droitement les âmes. » – « Comprenons bien la nécessité de l’étude, leur écrit-il en 1883, secouons énergiquement au besoin cette torpeur que nous éprouvons pour l’acquisition de la science sacrée. » Il leur conseille aussi d’exercer l’autorité dans un esprit de charité : « Il ne faut pas paraître dominer sur nos populations mais plutôt les régir paternellement et suavement. »

            A cette époque où les relations entre catholiques et protestants sont souvent marquées par l’intolérance, Mgr Moreau recommande, en 1880, de se montrer « plus patients et plus tolérants afin de ne pas augmenter leur préjugés ». Il sait discerner « la partie saine et bien sensée de nos frères séparés qui sont toujours prêts à nous rendre justice en toute occasion » et il fait écho aux documents œcuméniques de Léon XIII invitant à la compassion et favorisant le mouvement de réconciliation.

*d’après le Recueil de célébrations des saints et saintes, bienheureux et bienheureuses du Canada, CECC.